Cinq questions à Jean Marc TEBOUL
Directeur Commercial MLP – MESSAGERIES LYONNAISES DE PRESSE
- MLP a été créée en 1945. Comment l’entreprise a-t-elle évolué au fil des décennies pour répondre aux attentes des éditeurs et aux mutations du secteur de la presse ? Combien de titres distribuez-vous ?
Début août 1945, des résistants lyonnais, membres du Conseil National de la Résistance, ont créé la coopérative MLP après avoir pris possession des locaux lyonnais de la messagerie Hachette, situés à Lyon. Pendant la deuxième guerre mondiale, la messagerie unique parisienne s’était soumise à l’occupant. Les fondateurs de MLP ont compris que la distribution de la presse, synonyme de liberté, ne pouvait dépendre uniquement d’un monopole détenu par des intérêts privés. Le 2 avril 1947, la loi Bichet a été votée au Parlement français ; cette loi organise une distribution libre contrôlée par les éditeurs. Nous en fûmes les précurseurs. Quatre-vingts ans plus tard, les MLP sont devenues le premier distributeur de presse magazine en France avec part de marché de 85% et près de 3000 titres distribués.Pour y parvenir, MLP a toujours défendu, avec constance, la liberté de distribuer la Presse, la liberté d’entreprendre, l’indépendance, la concurrence et la diversité de la Presse dans ses trois composantes : l’information, l’éducation et la récréation du public.
- Quelle place occupe l’export, notamment vers la Belgique, dans l’activité de MLP, et quels sont les enjeux spécifiques liés à la distribution de la presse française à l’étranger ?
L’export représente un enjeu incontournable pour MLP et ses éditeurs. A la fois parce que les ventes à l’export apportent un volume d’affaire complémentaire important pour les éditeurs, mais également parce que cette activité permet de consolider la francophonie à travers le monde en faisant rayonner les marques fortes des éditeurs au-delà de la France. L’export pèse à hauteur de 10% de l’activité de MLP. Pour certains éditeurs, cette proportion peut monter jusqu’à 25%. Et la Belgique y occupe une place de choix puisqu’elle représente notre 1er marché à l’export. Le marché belge est donc primordial pour MLP ! Et c’est dans ce cadre que nous opérons une collaboration de très grande proximité avec nos partenaires AMP et Tondeur Diffusion. Les échanges entre nos équipes sont quotidiens afin d’optimiser au mieux la distribution.
3 Comment MLP organise-t-elle sa logistique en France pour garantir la distribution quotidienne des titres, en particulier dans un contexte de rationalisation des coûts et de baisse des volumes ?
La France compte près de 19 000 points de vente qui distribuent tous des titres MLP. Ce réseau est livré par une soixante de grossistes de presse régionaux qui sont nos intermédiaires de distribution. Nous livrons ces grossistes 4 fois par semaine, qui, à leur tour, livrent le réseau de vente quotidiennement en fusionnant leur livraison avec les titres de notre distributeur concurrent et les journaux quotidiens.Il y a 2 ans, nous avons pris la décision de supprimer une journée de livraison vers les grossistes afin d’ajuster notre schéma logistique pour réduire nos charges afin de compenser la baisse des volumes. Afin de maintenir un coût de distribution compétitif pour nos éditeurs, nous sommes dans l’obligation d’adapter sans cesse notre outil industriel et logistique pour contenir nos coûts de fonctionnement et améliorer la productivité. Les tournées de transport et le taux de remplissage des camions sont en permanence optimisés et nous avons mis en place des mécanismes permettant de mieux lisser le traitement des flux. Récemment nous avons déployé des solutions informatiques innovantes sur nos sites pour optimiser la qualité et le temps de préparation.
4- Dans quelle mesure MLP peut-elle soutenir les marchands de presse belges, notamment face aux défis actuels de rentabilité, d’approvisionnement ou de diversité de l’offre ? Des actions concrètes ont-elles déjà été menées en ce sens ou sont-elles à l’étude ?
Le marché de la presse magazine est plus que jamais un marché d’offre ! Nous savons aujourd’hui que plus de la moitié des ventes de magazines sont déclenchées par des achats d’impulsion. Ce sont donc la qualité et la largeur de l’offre qui permettent à un marchand de presse de vendre plus. Il nous revient donc de travailler à l’optimisation de l’offre que nous proposons aux marchands belges : le bon produit au bon endroit avec un prix de vente ajusté. C’est en sens que nous devons intensifier encore nos actions avec AMP et Tondeur Diffusion afin d’adapter au mieux l’offre aux spécificités et au potentiel de chaque magasin.
Également, sur le marché français, nous sommes en train de réfléchir à un déploiement du réassort automatique. L’objectif étant de mieux répondre au potentiel de vente tout en maîtrisant le niveau initial de la fourniture au magasin. Mais pour déployer un tel dispositif, il faut pouvoir disposer de manière fiable des remontées de ventes de la grande majorité des marchands de presse en temps réel par le biais d’une connexion à leurs caisses. Un beau chantier en perspective !
5 -Comment voyez vous l’avenir du marché de la presse magazine ?
On ne va pas se mentir. Le marché va continuer à être tendu. Nous observons d’ailleurs les mêmes tendances en Belgique qu’en France. Le comportement des consommateurs est identique des 2 côtés de la frontière. Pour autant, nous sommes convaincus que notre marché de la presse magazine a encore un bel avenir devant lui. Plutôt que de parler de baisse, nous préférons parler de mutation. Les besoins des lecteurs et les modes de consommation ont évolué, et toute la filière doit continuer à s’adapter. Les éditeurs comme les distributeurs et les marchands.Dans la mesure où nous sommes passés en quelques dizaines d’années d’un marché de demande à un marché d’offre, il convient à présent d’aller résolument vers le consommateur pour le confronter au produit. Et donc de pouvoir positionner des rayons presse dans des zones de fort flux, en y déployant une offre suffisamment large et séduisante pour déclencher des actes d’achat. Il faut surprendre et exposer le consommateur à un environnement et une offre qui donnent envie .En France, nous constatons d’ailleurs que les points de vente implantés dans des zones de trafic important et proposant une « expérience client » séduisante, voient leurs ventes très bien se tenir. Ce qui est très encourageant.et pour finir, je peux vous confirmer que les éditeurs continuent à être tournés vers l’avenir avec une créativité qui ne faiblit pas et des projets plein les cartons !
Interview Walter Agosti